Jetée. 2020
Bois de Châtaignier, acier galvanisé, filet polypropylène
19 x 6 x 3 m
La jetée s'étend devant lui comme l'amorce d'une route inachevée, qui aurait entrepris de traverser la mer (Pierre Louÿs 1929)
La jetée est une œuvre praticable qui prend place dans le vallon de Kerbrevet, un endroit reculé du parc, résultat du lent travail du ruisseau portant le même nom et qui au cours du temps à façonné ce paysage encaissé, boisé, humide et préservé, qui tranche avec la plaine agricole alentour. Le ruisseau sinueux s'écoule au creux d'une tranchée dans la terre noire et meuble du marécage qui couvre le fond plat du vallon. Depuis le chemin que borde le ruisseau on aperçoit de l'autre coté une clairière où les rayons du soleil illuminent un pare-terre de ronces et de fougères qui se disputent le terrain et rendent l'endroit inaccessible.
La jetée nous invite au survol de cet écrin de nature sauvage. Depuis le chemin elle enjambe le ruisseau puis s'avance en surplomb dans ce terrain hostile et comme vierge de toute trace de passage.
L'étroite estacade de bois sur pilotis nous conduit au cœur de la clairière. À partir de ce point la suite du voyage s'entreprend de l'intérieur, à travers le champs des perceptions, posté sur cette station d'écoute de la nature qui compose avec le bruissement du vent dans les feuilles du cliquetis de l'eau glissant sur son lit caillouteux, des chants d'oiseaux, du craquement sec des arbres. Dans un lâcher-prise de soi aux éléments, nous retrouvons nos sensations d'enfance.
La jetée, passerelle entre deux milieux, projette notre corps dans un ailleurs temporel et physique activant un instant particulier de notre relation à la nature et au monde. On s'y engage sans savoir ce que l'on va trouver si ce n'est qu'elle nous conduit vers un autre nous-même trop souvent oublié.